A Jevigné, localité de l’entité de Lierneux, à mi-chemin entre Malempré et Vielsalm, les troupes allemandes sont soumises à un bombardement intense de la part des unités américaines. Un coupable est tout désigné : le curé du village.
Soupçonné d'informer les Américains
Le 30 décembre 1944, les formations SS stationnées à Jevigné arrêtent l’abbé Antoine Fenaux. Dans les jours qui précèdent, ils ont interrogé mais sans succès les habitants du village pour le retrouver. Cet échec a eu le don de les énerver. Mais lorsqu’ils le découvrent, celui-ci les suit sans opposer la moindre résistance. Agé de 61 ans, l’ecclésiastique est accusé de détenir un poste-émetteur et de transmettre des signaux lumineux aux Américains depuis la tour de l’église. Preuve de ce que les Allemands qualifient de « trahison », il aurait conseillé aux habitants d’évacuer leur maison… Ce faisant, il a de fait repris les conseils diffusés par les postes émetteurs alliés et ce depuis le débarquement de Normandie mais sans qu’il n’y ait la moindre preuve de contacts effectifs avec les Américains. Aucun poste émetteur n’a d’ailleurs été retrouvé. Mais les SS installés dans le village sont particulièrement agressifs et veulent à tout prix trouver un coupable face au déluge de feu qui s’abat sur eux. Fenaux est abattu le jour même de son arrestation d’un coup de feu tiré à bout portant après avoir été vraisemblablement torturé durant son interrogatoire. Les habitants, qui ont pris la fuite ou se sont terrés dans les caves, ignorent le sort qui lui a été réservé. Néanmoins la rumeur de son exécution circule.

Légende d'origine : Eglise de Jévigné
Hommage à l'abbé Antoine Fenaux

Légende d'origine : Monument Antoine Fenaux
Ce n’est qu’après le départ des Allemands que des recherches sont entreprises. Dans le jardin de la propriété Noël, quelques habitants remarquent que la terre a été fraîchement retournée. En se mettant à creuser, l’étoffe de la tenue ecclésiastique apparaît. C’est bel et bien le cadavre de l’abbé enterré à la hâte.
Le 21 juillet 1957, un monument, installé sur la route de Manhay, a été inauguré à l’issue de la grand-messe. Il rend hommage à l’abbé « tombé ici à la tâche tué par l'ennemi le 30-12-1944 ». Les responsables de ce qui peut être qualifié de « crime de guerre » n’ont jamais été poursuivis.
Bibliographie
Matthieu Longue, Massacres en Ardennes. Hiver 1944 - 1945, Bruxelles, Racine, 2006.
Les crimes de guerre commis pendant la contre-offensive de von Rundstedt dans les Ardennes décembre 1944 - janvier 1945, Liège, Thône, 1948.
En partenariat avec Liberation Route Europe: Monument à Antoine Fenaux