Préparer la Libération du territoire
Dans la perspective de la Libération, le gouvernement de Londres entend coordonner, encadrer et stimuler les forces de la résistance dite « armée » (et qui ne le sont souvent que fort peu) de façon à les engager sur le terrain contre l’ennemi. L’idée était également de faire valoir les droits de la Belgique dans le cadre de la victoire des alliés. Des parachutages importants d’armement sont prévus à l’approche des armées alliées, anticipant de peu une mobilisation générale de la Résistance, qu’il s’agisse de l’Armée secrète, des Milices patriotiques du Front de l’Indépendance ou des groupes de combat d’autres formations…. Il est aussi prévu d’envoyer par la voie des airs des commandos d’instructeurs qui pourront le cas échéant donner un coup de main à l’insurrection nationale.
Le roi Salomon a mis ses gros sabots
Au début, ce schéma est plus ou moins bien suivi. Le 8 juin 1944, relayant le gouvernement Pierlot, la BBC lance sur les ondes le message annonçant la phase d’action (« Le roi Salomon a mis ses gros sabots »). Dans la foulée, les sabotages se multiplient effectivement en territoires occupés, ralentissant le trafic ferroviaire et parasitant les communications. Le 31 août, le gouvernement ordonne à la résistance d’occuper les « refuges », les centres de rassemblement, châteaux ou fermes situés en zones rurales mais à proximité d’agglomérations ‘sensibles’. Mais, faute de temps, les parachutages d’armes envisagés n’ont pas lieu, et la « mobilisation générale » n’est que partielle, l’avancée très rapide des armées alliées limitant la durée des opérations de harcèlement à deux ou trois jours. Le travail de la résistance se révèle efficace et rentable, malgré quelques pertes, lorsque les troupes secrètes sont en contact direct avec les unités alliées, comme dans le Hainaut, à Anvers ou à Gand. Là où la concentration des forces résistantes (surtout de l’Armée secrète) se fait de manière trop précoce et sans tenir compte de la présence d’une armée d’occupation encore aux abois (comme à Forêt-Trooz, non loin de Liège, à Sohan, à Sovet ou encore Pessoux), la répression frappe durement, avec un bilan de plusieurs dizaines de morts. Seuls les maquis équipés en termes d’armement, encadrés et entraînés parviennent à s’en tirer sans trop de victimes (celui de Jannée, à proximité de Ciney, et celui de la Thiérache (service Hotton de Marcel Franckson).
Enfin, çà et là, des éléments isolés, excités à l’approche de la Libération et parfois résistants de la dernière heure, se risquent à faire un « carton » sur l’ennemi en retraite. Ces actions, mal encadrées, se soldent à plusieurs reprises par des victimes civiles innocentes (Marcourt, Buissonville,…). Mais c’était sans doute inévitable vu les circonstances de l’époque…
Bibliographie
Bernard Henri(dir.), L’Armée Secrète 1940-1944, Paris-Gembloux : Duculot, 1986.
Franckson Marcel & Burniat Jacques, Chronique de la guerre subversive : le Service Hotton en Thiérache, 1941 – 1944, Bruxelles : FDM, 1996.
Maerten Fabrice & Colignon Alain, La Wallonie sous l’Occupation (Villes en guerre), Bruxelles/Waterloo : CegeSoma/La Renaissance du Livre, 2012.
Marquet Victor, « Quand un maquis d’Ardenne mettait ses « gros sabots » », in : Jours de Guerre, n°19, 1995, p. 7-21.