Dans l’enthousiasme du départ
10 mars 1942. Un contingent d’un peu plus de 600 hommes en partance pour le Front de l’Est défile dans les rues de Bruxelles. C’est le quatrième groupe de légionnaires wallons à partir depuis le mois d’août précédent. Si la presse censurée se montre particulièrement enthousiaste à leur égard, elle se montre beaucoup plus discrète sur les incidents qui vont émailler le déroulé de la journée.
Une triple opération
Dès le matin, le quartier général de Rex, rue du Midi, est la cible d’une explosion. Toutes les vitres de l’immeuble sont soufflées et les maisons situées à proximité endommagées. Dans un deuxième temps, des cartouches de dynamite sont découvertes dans une poubelle de la place Rogier. Mais surtout, à l’approche du défilé des troupes sur le boulevard Anspach, non loin de la Bourse, une explosion se produit. Dix personnes sont blessées dont quatre grièvement.
De ces trois opérations, seule l’explosion du boulevard Anspach est évoquée par un entrefilet dans Le Pays réel, le journal rexiste. On peut y lire que des « éléments subversifs ont tenté de troubler le défilé des volontaires rexistes ». Mais, cet « attentat criminel » n’aurait en rien empêché la manifestation de se dérouler « dignement ». Le communiqué de l’Agence Belgapress conclut pour sa part que la population se détourne avec dégoût de ces « éléments criminels ». Fins observateurs de la vie dans la capitale, Paul Delandsheere et Alphonse Ooms ont des termes bien différents pour évoquer les légionnaires en partance : ils les considèrent comme « des traîtres et nullement comme les sauveurs d’une Europe menacée ». La presse censurée, elle, consacre de longs reportages à ce départ, décrivant par le menu détail la cérémonie qui a symboliquement débuté sur la Grand-Place. Après les chants et les discours, le cortège s’est mis en route vers la Gare du Nord. Vers 19 h, le train s’est ébranlé… Aucun légionnaire n’a été blessé par l’explosion.
Des attentats qui se multiplient
Ces attentats ne sont pas des faits isolés. Quelques jours auparavant, des locaux de la Zwarte Brigade à Anderlecht ont été pris pour cible et le 6 mars, c’est une autre réunion préparatoire au départ pour le Front de l’Est qui a fait l’objet d’une attaque. Derrière ces actions, on retrouve des militants communistes. D’autres attentats se produisent en Wallonie. Ils visent des infrastructures industrielles mais aussi les milieux de la collaboration et, plus particulièrement, les contingents en partance pour le Front de l’Est. Trois jours plus tard, le 13 mars 1942, devant la multiplication du nombre d’attentats, le collège des secrétaires généraux en appelle au calme, rappelant la nécessité du maintien de l’ordre : « ceux qui le troublent se font les pires ennemis de leur patrie ».
Bibliographie
Gotovitch José, Du rouge au tricolore. Les communistes belges de 1939-1944. Un aspect de l’histoire de la Résistance en Belgique, Bruxelles, 1992.