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Fontaine-l'Evêque. La Résistance à l'échelle locale

Thème - Résistance

Auteur : Salamone    Mathilde

A l’instar d’autres entités de la région de Charleroi, la commune de Fontaine-l’Evêque (7747 habitants en 1940) voit se développer une résistance fortement marquée par la présence du Front de l’Indépendance même si ce mouvement n’est pas le seul présent. Le front du refus s’enracine dans sa base ouvrière. Renseignements, sabotages et presse clandestine en sont les principales caractéristiques. 

Un ancrage local et professionnel

Fontaine-l’Evêque est une commune du bassin industriel de Charleroi. Depuis 1926, elle est dirigée par une majorité absolue socialiste. Elle est intégrée au Grand Charleroi créé en août 1942 à l’initiative de l’occupant, perdant ainsi son autonomie ; le bourgmestre et le conseil communal sont révoqués. A la suite de ce changement, les rexistes prennent la direction du Grand Charleroi.

La résistance est présente à Fontaine-l’Evêque à partir de l'automne 1940 et ce jusqu’à la Libération. Plusieurs mouvements s’implantent dans la commune, le plus présent étant le Front de l’indépendance. Cette prédominance s’explique par l’attrait exercé par ce mouvement sur les milieux populaires, qui rassemblent la grande majorité des habitants de cette commune industrielle. D’autres mouvements, tels le Groupe G, l’Armée secrète et le Mouvement national belge, sont également actifs à Fontaine-l’Evêque. Par ailleurs, des services de renseignements et d’action y disposent de cellules. On y retrouve notamment les réseaux Luc-Marc, Zéro et Socrate, et la mission Baboon-Othello. 

Les individus impliqués ont, en majorité, entre 15 et 40 ans et c’est lors de l’année 1942 et à l’approche de la Libération que le pourcentage d’affiliation est le plus élevé. Les professions sont assez variées mais une majorité des résistants sont des ouvriers, un grand nombre travaillant dans l’industrie lourde. Certains d’entre eux mettent leurs compétences professionnelles au profit de la résistance. Le cas de la SNCFB est assez représentatif de la corrélation qui peut exister entre les activités clandestines et celles exercées officiellement. L’implication de résistants en son sein permet le développement de sabotages sur le réseau ferroviaire mais également d’obtenir des informations sur le contenu des convois et leur destination.  

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Institution : CegeSoma/Archives de l'Etat
Collection : Sabotages chemin de fer, 1943-1944
Légende d'origine : Sabotage. Pont de Venterre à Fontaine l'Evêque, 1943-1944

Une presse clandestine issue de la commune : le journal "Quand Même!"

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Institution : CegeSoma/Archives de l'Etat
Légende d'origine : Quand Même n°5, mai 1941.

Lors de la Seconde Guerre mondiale, de nombreux journaux clandestins voient le jour. Ceux-ci dénoncent la politique de l’occupant et, peu à peu, poussent à agir contre lui. Les journaux sont soit indépendants, soit liés à des mouvements de résistance ou à des partis politiques. Plusieurs d’entre eux circulent dans la commune dont L’indépendant et Le Métallo, attachés au Front de l’Indépendance, ou encore La Libre Belgique, organe indépendant de tendance catholique. 

Le journal Quand Même!, diffusé d’octobre 1940 à avril 1942, est créé et rédigé par des socialistes de la région, dont Louis Jasmes de Forchies-la-Marche et Léon Vandenbruwaene de Fontaine-l’Evêque, ainsi que par Frédéric Piérard, vicaire dans la même commune. Les premiers numéros sont d’ailleurs réalisés à Fontaine-l’Evêque. Les suivants sont, quant à eux, tapés sur une machine du Palais du Peuple à Charleroi, lorsque les Allemands ont quitté leur poste dans le bâtiment, en d’autres termes pendant la pause de midi et après 17 heures. Durant sa période de publication, 20 numéros, tirés à entre 300 et 350 exemplaires, paraissent de manière irrégulière. Le contenu de Quand Même! tend à relever le moral de la population. Il se positionne également contre l’envoi de travailleurs belges en Allemagne. Il nuance cependant sa position en demandant à la population de différencier les individus qui s’y rendent par obligation et ceux qui se déplacent dans l’objectif de s’enrichir. L’arrestation de Frédéric Piérard le 10 juillet 1941 ébranle les fondations du clandestin. Les trois principaux responsables du clandestin connaîtront un sort tragique, puisque Piérard et Vandenbruwaene, arrêtés, mourront dans les camps de concentration. Louis Jasmes est abattu le 18 août 1944 par les rexistes lors de la tuerie de Courcelles.

 

La bataille du terril de Fontaine-l’Evêque

Du 4 au 5 septembre 1944, un heurt se déroule sur le terril de Fontaine-l’Evêque impliquant la résistance locale et des soldats allemands. Ces derniers, en retraite suite à l’avancée des alliés, orchestrent des sabotages afin de ralentir la Libération du pays. La majorité des résistants, principalement affiliés au Front de l’indépendance et au Groupe G, lance alors une opération contre les occupants retranchés sur le terril de la ville. Durant cette bataille, victorieuse pour la résistance et les Américains venus apporter un soutien militaire, une quinzaine d’habitants perdront la vie. Un monument aux morts situé rie du 5 septembre leur rend hommage.


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Institution : Cercle d'Histoire et d'Archéologie de Fontaine-l'Evêque
Collection : https://chaf6140.wordpress.com/revues/faits-darmes/1940-1945-2/5-septembre-1944/
Droits d'auteur : Droits réservés
Légende d'origine : Funérailles des victimes de la bataille du terril, s.d.

Lors de la Seconde Guerre mondiale, une centaine d’habitants de Fontaine-l’Evêque ont participé à divers mouvements de résistance. Une trentaine l’ont payé de leur vie, que ce soit dans les combats de la Libération ou du fait de la répression nazie. En combattant l’ennemi à l’échelle locale, et parfois même régionale ou nationale, ils ont contribué  à la libération de leur ville et du pays.  

 

Bibliographie

Maerten, F., Du murmure au grondement : la résistance politique et idéologique dans la province de Hainaut pendant la Seconde Guerre mondiale (mai 1940-septembre 1944), Mons, 1999, p. 273-369. 

Parée, J., Histoire de la ville de Fontaine-l’Evêque, dans Le petit musée virtuel de Fontaine-l’Evêque, http://www.bivort.com/histoire... (consultation 20/03/22). 

Delaet, J-L., Le Pays de Charleroi de l'Occupation à la Libération 1940 – 1944, Charleroi, 1994, p. 11-57. 

Pour en savoir plus

27948.jpg Articles Résistance Maerten Fabrice
Pour citer cette page
Fontaine-l'Evêque. La Résistance à l'échelle locale
Auteur : Salamone    Mathilde
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