Belgique en guerre / Personnalités

Altenhoff Richard

Thème - Résistance - Persécution des Juifs

Auteur : Ferooz Sophie (Institution : Administration communale de Woluwe-Saint-Lambert)

« Ç’en est fait ; je suis battu – mais nullement abattu. […] Sache que je ne regrette pas ce que j’ai fait ; je regrette seulement de m’être laissé prendre ». Richard Altenhoff dans une lettre à sa mère, le 29 mars 1944.

Ingénieur issu de l’ULB, profondément attaché aux libertés, Richard Altenhoff participe à la campagne des 18 Jours avant de s’engager dans la résistance. Avec Jean Burgers, Henri Neuman et André Wendelen, il fait partie des fondateurs du Groupe G, spécialisé en sabotages. Il est arrêté suite à l’attaque du 20e Convoi. Il n’y a cependant joué qu’un rôle secondaire. Il est fusillé au Tir national en mars 1944.

Les années de formation

Richard Altenhoff est né le 20 juin 1913 à Bruxelles d’un père allemand et d’une mère française. Il grandit dans une famille bourgeoise, soudée et patriote. Durant la Première Guerre, il est longtemps séparé de son père qui a dû se mettre hors d’atteinte de l’occupant, pour ne pas avoir à porter les armes contre son pays d’adoption. 

Il entre à l’école polytechnique de l’Université libre de Bruxelles en 1933. Mélomane peu enclin à la guindaille, il fréquente les concerts et le cercle du Libre Examen, dans lequel il s’investit activement. Homme mesuré et calme, il sait défendre ses convictions avec passion et fermeté. Très attaché au rejet du dogmatisme, à la défense des libertés et à la tolérance, il anime les discussions du cercle où il rencontre Jean Burgers, les frères Livchitz, Henri Neuman, Ilya Prigogine et d’autres.

Diplômé en 1938, il effectue son service militaire. Il est encore sous les drapeaux lorsque l’armée belge est mise sur le « pied de paix renforcée » après l’invasion de la Pologne par l’Allemagne en septembre 1939. Il participe à la campagne de 18 Jours en mai 1940. Au moment de la capitulation, il est chef de peloton dans la 15e division d’infanterie, Compagnie de Troupes de Transmission (15e TTR), chargée d’établir les lignes de communication pour la 16e compagnie du Génie, spécialisée en... sabotages.

Richard Altenhoff
Institution : CegeSoma
Droits d'auteur : CegeSoma
Légende d'origine : Richard Altenhoff, premier chef du "Service national de Matériel" du Groupe G (arrêté en juillet 43 et fusillé en mars 1944).

L’engagement

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Institution : Cegesoma/Archives de l'Etat
Légende d'origine : Exemple de sabotage ferroviaire commis par le groupe G, s.l.n.d.
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Institution : http://www.maisondusouvenir.be
Légende d'origine : Ecusson du Groupe G

Revenu à la vie civile, il trouve un emploi à la Société continentale & coloniale de construction (« Socol »), une entreprise de construction et de travaux publics. Sa fonction l’amène à effectuer des visites de chantiers un peu partout dans le pays, ce qui s’avère fort utile pour la collecte d’informations. Il est rapidement contacté par Henri Neuman, son camarade du Libre Examen, lui-même recruté par le professeur Jean Pelseneer déjà en contact avec l’Intelligence Service anglais. C’est ainsi qu’il rejoint Jean Burgers, Henri Neuman et Robert Leclercq, tous anciens étudiants de l’ULB. Ensemble, ils fondent une cellule spécialisée dans le sabotage : c’est le futur Groupe G. À cette étape, les rôles précis et la structure du groupe n’existent encore que dans les esprits. Chacun apporte ses idées et cherche le concours de connaissances dignes de confiance. 





Richard Altenhoff est désigné comme responsable logistique. Il faut trouver, recevoir, acheminer, répartir du matériel. Il participe à l’identification des cibles et à la conception des opérations de sabotage. En ces modestes débuts de l’organisation, il est l’un des principaux agents du groupe et travaille d’égal à égal avec Jean Burgers. Richard Altenhoff devient ainsi l’un des meneurs du G, « l’intellectuel de grande classe, le « penseur » du G, auquel il imposa sa marque ».

Grâce au parachutage d’André Wendelen en janvier 1942, porteur d’un ordre de mission de la part du gouvernement en exil, le Groupe G devient une structure organisée complexe avec à sa tête Jean Burgers (nom de guerre : Fernand Gérard, qui donne son nom à l’organisation) et un état-major, auquel appartient Richard Altenhoff. Le groupe agit de manière rigoureuse et organisée. Il prospecte afin d’identifier des cibles potentielles, les opérations sont minutieusement étudiées et discutées par l’état-major du groupe, avant qu’il soit décidé – ou non – de passer à l’action.

Le tournant

En 1943, Youra « Georges » LivchitzRobert Maistriau et Jean Franklemon entreprennent d’attaquer le 20e convoi vers Auschwitz. Ni le Groupe G, ni les autres organisations résistantes n’ont les moyens matériels de se joindre à l’opération, qui s’annonce du reste extrêmement dangereuse et coûteuse en vies humaines. Richard Altenhoff, agissant pour le Groupe G, se charge de fournir le peu d’armement disponible. Il rencontre les trois hommes à la place Meiser le soir du 19 avril 1943 et leur remet une arme de poing et 7 cartouches.

Il est arrêté au domicile familial par la Gestapo, le matin du 3 juillet 1943, vraisemblablement sur dénonciation. Pendant près de neuf mois, il est emprisonné au fort de Breendonk où il connaît la torture. En mars 1944, il est transféré à la prison de Saint-Gilles en vue de son procès. Il est jugé par un tribunal militaire le matin du 15 mars 1944, aux côtés d’autres résistants, dont Jean Franklemon. Condamné à mort pour acte commis au préjudice de la Wehrmacht et détention d’armes, il est fusillé le 30 mars 1944 au Tir National à Schaerbeek.

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Institution : © NMBS Groep, Brussel – Groupe SNCB, Bruxelles
Légende d'origine : Pour la première fois, les Juifs sont déportés dans ce type de wagon.

Reconnaissances posthumes

Reconnu prisonnier politique, résistant armé et agent de renseignements et d’action, il a également reçu la Médaille de la Résistance, la Croix d’Officier de l’Ordre de Léopold avec palme et la Croix de Guerre 1940-1945 avec palme, la Médaille commémorative de la Guerre 1940-1945 avec deux sabres croisés et la Croix de Prisonnier politique de la Guerre 1940-1945.

En 2019, une Stolperstein a été installée devant son dernier domicile, 138 rue de la Cambre à Woluwe-Saint-Lambert (Bruxelles), à l’initiative de l’Association pour la Mémoire de la Shoah et en souvenir de sa participation à l’attaque du 20e convoi. Un panneau didactique implanté devant l’école Parc Malou-Robert Maistriau et associé à ce dernier, lui a été dédié par la commune de Woluwe-Saint-Lambert en 2021.

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Légende d'origine : Stolperstein Richard Alhenhoff, Woluwe-Saint-Lambert
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Légende d'origine : Panneau didactique Richard Altenhoff, Woluwe-Saint-Lambert

Bibliographie

A. L. A., Message pour Philomène. Bruxelles, Editions du Métro,1948.

Livre d’Or de la Résistance belge, Bruxelles, Commission historique de la Résistance, Éditions Leclercq, s.d..

Neuman Henri, Avant qu’il ne soit trop tard, Bruxelles, Éditions Duculot, 1985. 

Ugeux William, Le Groupe G (1942-1944). Deux héros de la Résistance : Jean Burgers et Robert Leclercq, BruxellesÉditions Elsevier, 1979.

Archives

Dossier personnel militaire (Classified Archives – La Défense).

Dossiers personnels Groupe G et Agent de renseignements et d’action au Cegesoma/Archives de l'Etat.

Dossier personnel de Prisonnier politique au Service Archives des Victimes de la Guerre/Archives de l'Etat.

Registres de la population et de la milice de la Commune de Woluwe-Saint-Lambert.

Archives de l’ULB.

 

Pour citer cette page
Altenhoff Richard
Auteur : Ferooz Sophie (Institution : Administration communale de Woluwe-Saint-Lambert)
https://www.belgiumwwii.be/belgique-en-guerre/personnalites/altenhoff-richard.html