Etienne Woestyn est né le 26 décembre 1907 à Heist. Il a fait ses études secondaires dans une école francophone de Bruges et a étudié à l'Université de Gand. Il a beaucoup voyagé, ce qui lui a permis d'apprendre des langues ; outre le néerlandais et le français, il étudie l'allemand, l'anglais, l'italien et l'espagnol. Après ses études, il devient fonctionnaire aux Affaires étrangères en 1930, où il étudie notamment les relations commerciales germano-belges. Il se marie le 3 octobre 1931 et a deux enfants. Nommé chef adjoint du département des crédits publics au ministère des finances en 1938, il devient, peu après, en septembre 1939, directeur général du service de contrôle au ministère du Ravitaillement.
A l’heure de l’occupation, le gouvernement envoie Woestyn en France pour rapatrier les réfugiés belges. De retour en Belgique, Woestyn est nommé chef du service de contrôle du Commissariat aux Prix et aux Salaires. Ce service de contrôle n'est pas le seul : il en existe plusieurs dans d'autres départements, tels l'Inspection de l'alimentation et du ravitaillement, les bureaux de contrôle des services de l’approvisionnement et de la distribution, et enfin les services de contrôle et de recherche du Commissariat aux prix et aux salaires. En théorie, cette division n’empêche pas une bonne coopération; en réalité, elle n'entraîne que des conflits. Le Comité des Secrétaires généraux décide dès lors de rationaliser ces différents services et crée, le 20 août 1941, l’Administration des services de contrôle, dont Woestyn est nommé directeur général le 1er septembre 1941.
Woestyn a un profil politique ambigu : d'une part, il est membre du Mouvement National Royaliste (MNR), une organisation de résistance politiquement à droite, pour laquelle il doit organiser des missions et des actions de résistance. D’autre part, il est partisan de l'Ordre nouveau sur le plan économique et sympathisant du VNV.
Mesures et ordres de service
L'une des nombreuses mesures prises par l’Administration des services de contrôle, en collaboration avec la Société nationale des chemins de fer belges, concerne les voyages avec bagages à main. A partir du 5 juin 1942, il est interdit de transporter des bagages à main volumineux car ils gêneraient les autres voyageurs. Il est également interdit de transporter des denrées tels que des pommes de terre dans les bagages à main. Il s'agit d'une des tentatives de lutte contre la contrebande en tram et en train. Désormais, en cas d'infraction à l'une de ces mesures, le contrevenant se verra interdire l'accès au quai. Woestyn doit également prendre des mesures au sein des services de contrôle eux-mêmes pour faire de l'ordre. Citons par exemple l'ordre de service 27 du 11 juillet 1942 sur la vente de marchandises au sein du personnel lequel s’est souvent approprié des biens confisqués. Cette pratique n'est pas admise par la hiérarchie et sera désormais sévèrement sanctionnée.
Après-guerre, Etienne Woestyn est jugé à trois reprises. Le premier procès a lieu devant le conseil de guerre, qui l'acquitte le 22 février 1947. Au cours de ce procès, ses avocats révèlent que Woestyn a été membre du M.N.R et, à partir du 1er avril 1941, agent de renseignement pour les Alliés. De plus, il aurait fait engager des jeunes gens au service de contrôle pour les soustraire au service de travail obligatoire. Enfin, à partir de 1944, il aurait mis des véhicules de service à la disposition de la résistance pour transporter de la presse clandestine et des armes.
La deuxième fois que Woestyn doit comparaître en justice, c'est devant la Cour militaire, qui rejette l'acquittement prononcé par le Conseil de guerre. En appel, Woestyn est condamné à cinq ans de prison et au paiement d'une indemnité de 100 000 BEF à l'État belge. Etienne Woestyn est en effet accusé d'avoir aidé l'occupant en lui transmettant des listes de noms de fraudeurs professionnels, conformément à la circulaire T 205. Les personnes visées étant ensuite astreintes au travail en Belgique ou en France par l'occupant. Mais Woestyn aurait aussi contrecarré cette mesure par un contre ordre verbal. Il est par aussi accusé de dénonciations. L'arrêt est cassé par la Cour de Cassation. L'affaire est à nouveau entendue par la Cour militaire, qui condamne finalement Woestyn à six mois de prison. Ces différents procès créent une situation difficile : une partie de la population considère Woestyn, et les autres accusés, comme des traîtres et des collaborateurs, qui doivent se repentir. Une autre partie, tout comme le journal De Nieuwe Standaard, soutient l'accusé et son souci de réhabilitation.
Archives Etienne Woestyn, directeur général de l'Administration des services de contrôle (du Ravitaillement) : correspondance, notes, rapports, circulaires, 1939-1947, Archives générales du Royaume 2 - dépôt Joseph Cuvelier, CegeSoma, inv. n° AA 1633.
Rochet, Bénédicte, L'administration belge pendant la Deuxième Guerre mondiale : refuge et berceau de modernisation?, Bruxelles: CEGES, 2002.
Strubbe, Filip, Inventaris van het archief van het Ministerie van Binnenlandse Zaken en Volksgezondheid. Bestuur der Controlediensten en Vereffeningsdienst [Controle op de ravitaillering], 1940-1947, série Inventaires Archives générales du Royaume n°680, publication n°6188, Archives générales du Royaume, Bruxelles, 2021
Wouters, Nico, De Führerstaat: overheid en collaboratie in België (1940-1944), Tielt: Lannoo, 2006.
