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Vlaams Nationaal Verbond (VNV)

Thème - Collaboration

Auteur : De Wever Bruno (Institution : UGent)

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Parti nationaliste flamand fondé en 1933. C'est l'organisation collaborationniste la plus importante en Flandre. Après la Seconde Guerre mondiale, il est frappé d'interdiction en tant qu'organisation incivique.

Les années 1930

Le VNV est né en 1933 de l'union de plusieurs partis nationalistes flamands anti-belges. Le programme de la nouvelle formation s'inspire d'autres mouvements d’extrême droite, nationalistes et fascistes, en Europe. Le VNV veut rattacher la Flandre aux Pays-Bas en partant du principe que les néerlandophones forment un seul peuple "thiois". Il se considère comme une avant-garde révolutionnaire et ne s’estime en principe pas lié par les lois de l'État belge, qui est dépeint comme une construction contre nature et contre le peuple, à détruire par tous les moyens. Dans la pratique, le VNV opère dans le cadre de la légalité belge et cherche à prendre le pouvoir par le biais d'élections. Fort de quelque 30 000 membres, le parti séduit 15 % de l'électorat flamand lors des élections de 1939, les dernières de l'avant-guerre. En 1938, le parti a déposé à l’échelon local des listes de cartel ou s’est présenté en coalition avec des sections du Katholieke Vlaamse Volkspartij fédéralisé et parfois avec Rex-Vlaanderen sur la base d'un programme pro-flamand et de droite. Les socialistes, les libéraux et le mouvement syndical chrétien combattent, et non sans raison, le VNV en tant que parti fasciste et pro-allemand.

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Institution : CegeSoma/Archives de l'Etat
Droits d'auteur : Cegesoma/Archives de l'Etat
Légende d'origine : Staf de Clerq, leader du VNV, prononce un discours à Louvain (Leuven), 04/03/1937.

Contacts avec l'Allemagne nazie

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Institution : CegeSoma/Archives de l'Etat
Droits d'auteur : CegeSoma/Archives de l'Etat
Légende d'origine : Reimond Tollenaere, 1941.







Le journal du VNV, Volk en Staat, est financé et en partie contrôlé par les responsables de l’Allemagne nazie. Staf De Clercq, le chef du VNV, entretient des contacts avec l'Abwehr, en vue de la guerre imminente. Il met en place une organisation militaire (Militaire organisatie, MO) composée de membres du VNV dans l'armée belge mobilisée, prêts à suivre n'importe quel ordre donné par De Clercq, jusqu'à la désertion et au sabotage. Bien que le VNV dispose en principe d'une direction suprême collégiale composée de cinq personnes, De Clercq suit en la matière une voie politique personnelle et s'appuie principalement sur son chef de la propagande, Reimond Tollenare, qui est un national-socialiste pro-allemand convaincu. A la stupéfaction de certains autres dirigeants, De Clercq prend les devants avec la MO en proposant dès le 4 juin 1940 une collaboration avec l’occupant allemand. Avec l’appui de ce dernier, il pense pouvoir réaliser le programme du VNV ; l'acquisition d'un pouvoir politique total en Flandre d’une part, l'instauration de l’Etat thiois (Dietsland) et la destruction de l'Etat belge de l’autre.

 

Collaboration sans garanties politiques




Concernant ce dernier point, ses requêtes restent rapidement lettre morte car Hitler ne souhaite provisoirement pas prendre de décision quant à l'avenir politique de la Belgique, également une raison pour laquelle il maintient une Administration militaire en Belgique sans mandat politique. Un nouvel État puissant à la frontière occidentale de l'Allemagne est également aux antipodes de ses pensées, qui vont plutôt dans le sens d'une annexion de la Flandre et des Pays-Bas à l'Allemagne. En août 1940, l’Administration militaire torpille une tentative du VNV de créer un vaste mouvement populaire parce que ce dernier ne veut pas renoncer à une nation thioise.

Dès lors que les dirigeants du VNV acceptent qu'Hitler détermine les frontières, le parti peut devenir le partenaire privilégié de l'administration d'occupation. Ceci permet l’infiltration massive de membres du VNV dans l'administration du pays, mais l’administration belge reste formellement en place parce qu’elle n'a pas de mandat politique, parce que l'exploitation de l'économie belge est une priorité pour l'effort de guerre allemand et que l’ordre et la paix seraient, le cas échéant, mis à mal.. En effet, les forces d'occupation n'ont pas à se plaindre de la volonté des responsables belges, tels le chef de l'État belge, les grands patrons, la Justice et l'Église catholique, de tendre à un modus vivendi. Dès lors, malgré ses ambitions totalitaires, le VNV ne réussit guère à s'emparer de ces lieux de pouvoir, limitant son emprise aux administrations locales et provinciales après que Gerard Romsée, chef de file du VNV, ait obtenu, sous la pression de l'occupant, le poste de secrétaire général à l’intérieur, contrôlant ainsi les nominations et la nouvelle organisation administrative dans le cadre d'une organisation corporatiste de l'État, sous l'impulsion de Victor Leemans, secrétaire général aux Affaires économiques, une figure de proue du VNV.

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Institution : CegeSoma/Archives de l'Etat
Droits d'auteur : Cegesoma/Archives de l'Etat
Légende d'origine : Gerard Romsée, 1940.

Sous le signe de l'unité – le VNV au service de l'occupant allemand

Seuls le Verdinaso et Rex-Vlaanderen sont contraints par les forces d'occupation de rallier le VNV en mai 1941, rebaptisée pour la circonstance Eenheidsbeweging-VNV. En échange de l'acquisition somme toute limitée du pouvoir, le VNV s'engage pleinement dans l'effort de guerre allemand. Les membres du VNV rejoignent la Vlaamse Wacht et la Fabriekswacht/Vlaamse Wachtbrigade qui sont déployées comme troupes auxiliaires des forces d'occupation. Le VNV recrute pour l'Organisation Todt, le Nationalsozialistisches Kraftfahrkorps et, à partir du printemps 1941, sous l'impulsion de Tollenare, également pour la Waffen-SS. Mais c'est surtout le combat sur le front de l'Est, qui débute le 22 juin 1941, qui revêt une grande valeur symbolique. Le VNV fonde une Vlaams Legioen antibolchevique, par laquelle elle espère rendre visible sa participation à l'effort de guerre allemand. Mais elle doit constater avec consternation que la Légion est enrôlée dans la Waffen-SS, où les volontaires sont soumis à la propagande pan-germanique. Tollenaere, que de Clercq considère comme son successeur, s'engage dans la Légion flamande mais meurt en janvier 1942.

Le nombre de membres du VNV grimpe jusqu’à quelque 50 000 en 1941, notamment parce que le parti est en mesure d'offrir des postes de pouvoir dans l'administration du pays. Il peut également recruter dans une large sphère de catholiques flamands de droite, en partie grâce aux nombreuses listes de candidats et coalitions lors des élections communales de 1938. À partir de 1942, les effectifs du VNV se réduisent, jusqu’à environ 10 000 membres en 1944. La base du VNV remet rapidement en question les garanties politiques offertes en contrepartie de son engagement. Ils réalisent qu'il est interdit d’évoquer la revendication d’un Etat thiois et que les structures de l'État belge restent intactes. En outre, ils voient que l'ascension politique de Léon Degrelle, le leader de la collaboration francophone et de son mouvement grimpe rapidement et comment à partir de la direction de la SS à Berlin, un mouvement panallemand anti-VNV se développe en Flandre. Il s'agit de la SS flamande et, à partir de 1941, de la Duits-Vlaamse Arbeidersgemeenschap (DeVlag).

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Institution : CegeSoma/Archives de l'Etat
Droits d'auteur : CegeSoma/Archives de l'Etat
Légende d'origine : Départ de Bruxelles de volontaires flamands pour le front de l’Est. Leo Tollenaere, le frère de Reimond, est sur la photo (à gauche). 18/04/1943.
 

Concurrents panallemands et thiois

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Institution : KBR
Droits d'auteur : KBR/BelgicaPress
Légende d'origine : Article dans "Volk en Staat", 02/03/1944, concernant la rencontre entre Elias et Himmler.

C’est surtout Hendrik Elias, qui succède à Staf De Clercq à la tête du VNV à la mort de ce dernier le 22 octobre 1942, qui doit faire face aux tensions accrues au sein du VNV. Des groupes dissidents thiois en marge du VNV, mais aussi au sein du parti et surtout de la Nationaal Socialistische Jeugd in Vlaanderen, le mouvement de jeunesse du VNV, protestent contre l'influence croissante du DeVlag et contre le fait que le VNV se conforme de plus en plus à un avenir au sein d'une confédération pangermanique, tandis que l’idée de l’Etat thiois reste au frigo. Des voix importantes comme Frans Daels, le président du comité de l’Yser, qui a rejoint la direction du VNV en octobre 1940 mais en démissionne à la fin de l'année 1942, et le dominicain gantois Jules Callewaert expriment leur mécontentement, ce qui ne passe pas inaperçu. Elias réagit par une stratégie de tension en interdisant d'abord aux cadres du VNV et ensuite à ses membres d'être membres de la DeVlag. En août 1943, il cesse de recruter pour la Waffen-SS. Il espère ainsi être entendu par Hitler, mais ne réussit qu’à entrer en contact avec Himmler, qu'il rencontre en février 1944 et qui lui dit qu'il ne veut pas aller plus loin que la reconnaissance de la langue néerlandaise.

Lorsque Hitler décide d'annexer la Flandre à l'Allemagne en tant que Reichsgau le 12 juillet 1944, le VNV est politiquement mise à l'écart. Des milliers de membres du VNV sont alors engagés dans des organisations militaires et paramilitaires allemandes ou dans l'administration du pays. La direction du VNV ne voit pas d'issue pour eux. C'est en partie pour cette raison que le parti continue à collaborer jusqu'à l’extrême fin de l’occupation.

Répression

Après la guerre, le gouvernement belge interdit le VNV en tant qu'organisation incivique. Les membres du VNV qui occupaient des postes de direction et qui ont servi sur le plan militaire en Allemagne sont sévèrement punis. Theo Brouns, membre de la plus haute direction du VNV en tant que gouverneur du Limbourg, est exécuté pour son rôle dans les actes de terreur que les membres du VNV ont menés dans le Limbourg à l’encontre de la résistance. De nombreux membres ordinaires du VNV perdent leurs droits civiques. Après quelques années, une politique de clémence est mise en œuvre, permettant à la plupart des membres du VNV qui ont été sanctionnés d'être libérés et de recouvrir leurs droits politiques. Certains s’engagent dans les formations nationalistes flamandes de l'après-guerre, mais la plupart des dirigeants du VNV restent en retrait. Elias, condamné à mort mais gracié, reste en prison jusqu'en 1959. Il exerce une influence majeure sur Frans Van der Elst, qui devient président de la Volksunie, le parti nationaliste flamand de l'après-guerre où se retrouvent de nombreux anciens membres du VNV.

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Institution : KBR/BelgicaPress
Droits d'auteur : KBR/BelgicaPress
Légende d'origine : Article concernant le procès de Theo Brouns, "Het Laatste Nieuws", 01/06/1945.

Bibliographie

De Wever, Bruno. Greep naar de macht: Vlaams-nationalisme en Nieuwe Orde: Het VNV, 1933-1945. Tielt - Gent: Lannoo - Perspectief, 1994.

De Wever, Bruno. Vlaamsch Nationaal Verbond, in Encyclopedie van de Vlaamse beweging, 2025 https://encyclopedievlaamsebeweging.be/nl/vlaamsch-nationaal-verbond.

Pour citer cette page
Vlaams Nationaal Verbond (VNV)
Auteur : De Wever Bruno (Institution : UGent)
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