Seul gouverneur demeuré à son poste
Albert Houtart est docteur en droit (Université catholique de Louvain). Il devient Procureur du Roi à Bruxelles en 1920 et Procureur général dix ans plus tard. Le 7 février 1935, il est nommé gouverneur de la province du Brabant. Gendre du ministre catholique Henry Carton de Wiart, Houtart a un profil catholique.
Houtart démissionne de son poste au moment de l'invasion allemande, mais reste néanmoins à Bruxelles. Il est ainsi le seul gouverneur présent lorsque les Allemands occupent la capitale. Ces derniers ne considèrent dès lors pas qu’il se soit rendu coupable d’"abandon de poste", au contraire des autres gouverneurs belges. Il est dès lors le seul gouverneur belge autorisé à rester en fonction après mai 1940. Ce qui joue peut-être aussi, c’est le fait que les Allemands veulent se montrer particulièrement prudents dès lors qu’il s’agit de Bruxelles.
Un défenseur de la légalité belge
En 1940-1942, Houtart fait figure de défenseur de la légalité administrative belge d'avant-guerre. Il dénonce ouvertement l'ordonnance allemande contre le vieillissement de mars 1941. Il proteste également à plusieurs reprises contre les réformes de l'organisation communale par le secrétaire général Gerard Romsée. Il s'oppose aussi aux nominations au poste de bourgmestres de Rexistes et de membres du VNV extérieurs au conseil communal. Houtart peut user de son pouvoir officiel pour empêcher la nomination de bourgmestres de guerre issus de la collaboration dans la province de Brabant. C’est ce qu’il fait notamment en refusant de transmettre des dossiers de nominations. À plusieurs reprises, il est appelé à rendre des comptes à ce sujet, notamment par le Stadtkommissar allemand Karl Hahn. Il parvient parfois à convaincre des conseillers communaux de poser leur candidature au poste de bourgmestre. En partie du fait du rôle d’Houtart, le Brabant est l'une des provinces les moins propices à une prise de pouvoir par les partis collaborationnistes, en particulier Rex. Entre avril 1941 et septembre 1942, environ 30 % des nominations de bourgmestres se font contre la volonté de Houtart dans le Brabant.
Un adversaire à la création du Grand-Bruxelles
Houtart est l'une des chevilles ouvrières de la protestation contre la création du Grand Bruxelles. Il soutient le bourgmestre de Bruxelles, Jules Coelst, dans son refus d'employer les services communaux bruxellois pour distribuer l'étoile juive en juin 1942 et dans son refus d'associer la police pour arrêter les Juifs en juillet 1942. Il est également l'une des rares autorités à interdire la transmission de données personnelles dans le cadre du travail obligatoire en Belgique (introduit en mars 1942), en invoquant la notion de secret professionnel.
À la veille de la création du Grand Bruxelles, Houtart démissionne par une lettre en date du 16 juillet 1942. Romsée doit d'abord le remplacer par son bras droit et membre du VNV, Mathieu Croonenberghs (jusqu'au 1er mars 1943). Le gouverneur d'Anvers, Frans Wildiers, devient ensuite gouverneur faisant fonction du Brabant.
Des plaintes malgré son patriotisme
À la Libération, plusieurs plaintes contre Houtart sont instruites. Les deux principales qui font l’objet d’enquêtes judiciaires portent d’une part sur le fait qu'il a fait distribuer des affiches en faveur de l'emploi volontaire en Allemagne et, d'autre part, qu'il a fait pression sur les bourgmestres de Bruxelles pour qu'ils cessent leur opposition à la fourniture de métaux non ferreux. Houtart n'est cependant pas vraiment inquiété. Son patriotisme est incontestable. A la Libération, il reprend ses fonctions de gouverneur pendant une courte période avant de prendre rapidement sa retraite.
Bibliographie
Nico Wouters, Oorlogsburgemeesters 40-44. Lokaal bestuur en collaboratie in België, Lannoo, Tielt, 2004
Nico Wouters, De Führerstaat. Overheid en Collaboratie in België (1940-1944), Lannoo, Tielt, 2006