Depuis 1895, le précurseur du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale a encadré la législation sociale et, par la suite aussi, le marché du travail. Le département s'est développé pendant l'entre-deux-guerres avec l’élargissement de la concertation sociale, des assurances sociales et l'institutionnalisation de la politique de l’emploi. Pendant la Seconde Guerre mondiale, l'occupant est intervenu dans ces trois domaines ; les acteurs belges ont élaboré des plans pour y introduire des réformes, fondamentales ou non. Quels en ont été les effets sur le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale et quel a été le rôle exact de ce ministère ?
Les prémices
À la veille de la Seconde Guerre mondiale, le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale joue un rôle central dans la politique sociale, sans toutefois couvrir l'ensemble de la politique sociale. Lorsqu’un début de législation sociale a été mis en place à la fin du 19e siècle, les gouvernements catholiques, alors homogènes, ont mené une politique de "liberté subventionnée". Cela signifie que ce n’est pas l'État qui prend l'initiative de développer des services sociaux mais qu’il laisse ce rôle aux organisations sociales et les soutient financièrement. L'assurance-maladie est, par exemple, organisée de cette manière. Les personnes souhaitant bénéficier d'une assurance-maladie adhérent à une mutualité et celle-ci perçoit une subvention de l'État. Les organisations sociales sont ainsi encouragées et intégrées dans le système social belge. L'assurance-maladie n'est pas obligatoire, contrairement à l'Allemagne où le chancelier Bismarck a mis en place un système d'assurance sociale obligatoire à la fin du 19e siècle. Il espère ainsi couper l'herbe sous le pied des socialistes. Après la Première Guerre mondiale, la législation sociale belge est élargie, mais les principes sous-jacents de la "liberté subventionnée" et de l'implication des organisations sociales dans la politique sociale sont maintenus. Le principe est décliné différemment : les syndicats et les organisations patronales sont impliqués de manière paritaire dans un nombre croissant de domaines, tels que la fixation des salaires et les conditions de travail au sein des commissions paritaires ou dans la gestion de l'Office national de l'emploi et du chômage (ONEC), l’instance en charge de l'emploi dans les années 1930 qui fonctionne de façon centralisée et rationalisée.
Dans l'entre-deux-guerres, le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale est traditionnellement confié à un ministre socialiste ou démocrate-chrétien, ce qui est une évidence compte tenu de l'importance qu'ils accordent à l'élargissement de la protection sociale. En mai 1940, August Balthazar (1893-1952), membre du POB, est ministre du Travail et de la Prévoyance sociale. Le plus haut fonctionnaire du département, le secrétaire général Karel Verwilghen (1883-1979), est catholique. Après l'invasion allemande et le départ du gouvernement de Bruxelles, il se voit confier la direction du département.

Droits d'auteur : Droits réservés
Légende d'origine : August Balthazar, s.d. (1938)
Lutte contre le chômage

Légende d'origine : Destructions à Bruxelles, mai 1940

Collection : BelgicaPress
Légende d'origine : Vooruit, 7 juillet 1940, p.1
Après la capitulation, le chômage augmente fortement. Pour le résoudre, trois pistes sont suivies : la relance de l'activité économique, la reconstruction du pays et le travail en Allemagne. Dans ces deux derniers domaines, le ministère du Travail joue un rôle. En relançant l'industrie, on peut restaurer l'emploi. Ce redémarrage cadre avec la doctrine Galopin. L'un des arguments en faveur du redémarrage de l'industrie est d'éviter le chômage de masse, en supposant que les Allemands profiteraient de ce chômage pour, comme lors de la Première Guerre mondiale, forcer les travailleurs à aller travailler en Allemagne. Le chômage n’a pas sa place l'idéologie nationale-socialiste.
Outre la relance de l'emploi dans le secteur privé, l'État mène une politique active en la matière dans le cadre de la reconstruction. Les actes de guerre ont causé des dégâts matériels considérables. Pour les réparer de manière systématique, un Commissariat à la Restauration a été mis en place. Pendant les travaux de déblaiement, puis de réhabilitation et de reconstruction, les chômeurs peuvent être mis au travail. Le Commissariat général à la restauration est dirigé par Karel Verwilghen. Il peut ainsi contribuer directement à la politique de l'emploi menée par son département en prenant systématiquement en main les travaux de reconstruction, en les dirigeant de manière centralisée et en les encadrant financièrement. Par ailleurs, la décision du ministère du Travail de juin 1940 réformant l'aide aux chômeurs permet aux bourgmestres d'employer des chômeurs deux jours par semaine au déblaiement des dommages de guerre ou à d'autres tâches d'utilité publique.
Réorganisation des services de l'emploi
Dès le début de l'occupation, le Militärverwaltung poursuit une politique visant à encourager les Belges à aller travailler en Allemagne. Pour ce faire, elle a d'abord essayé d'encourager plutôt que de forcer. Outre la propagande, des arguments matériels sont utilisés, tels que la meilleure situation en matière de ravitaillement par rapport à la Belgique ou l’octroi de salaires et avantages sociaux allemands. L'administration militaire tente d'impliquer les services belges en charge de l'emploi dans ce recrutement. Malgré l'ordre du ministre Balthazar, le 14 mai 1940, de licencier le personnel de l'Office national de l'Emploi et du Chômage (ONEC) et de détruire les archives pour éviter que l'occupant ne recoure à l'administration pour mobiliser des chômeurs, Verwilghen décide de remettre les services en marche le 20 mai 1940. Par ailleurs, le service, désormais appelé Office national du Placement et du Contrôle (ONPC), est réorganisé dans le cadre de la mise en place d'un nouveau système d'allocations de chômage. Les chômeurs sont tenus de s'inscrire à l'office de l'emploi et leurs allocations peuvent être suspendues pendant un mois en cas de refus non justifié de travail.
Le directeur de l’ONEC, Gaston Grignard, a été démis de ses fonctions, laissant le service sans direction centrale pendant plusieurs mois, ce qui donne à l’occupant une grande marge de manœuvre au niveau local. En fonction des relations locales, des fonctionnaires des Werbestellen allemands (services de l'occupant chargés de recruter des travailleurs) s'installent dans les bureaux des offices de l’emploi et peuvent faire pression sur les chômeurs pour qu'ils aillent travailler en Allemagne. Certains offices de l'emploi privent les chômeurs de leurs allocations s'ils refusent d'aller travailler en Allemagne. Le compromis conclu avec le comité des secrétaires généraux, en vertu duquel les offices de l'emploi ne peuvent qu'afficher des offres d'emploi pour l'Allemagne, sans jouer de rôle dans le placement, n'a donc guère fonctionné en pratique pendant longtemps, et ce malgré les protestations de Verwilghen et de Jean De Voghel, le fonctionnaire en charge de l’emploi au ministère du Travail et de la Prévoyance sociale. En outre, les offices de l’emploi sont utilisés pour la mise au travail auprès des services militaires allemands en Belgique, ce que Verwilghen interdit à l'automne 1941.

Légende d'origine : Propagande pour le travail en Allemagne, s.d.
L’Office national du Travail
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Légende d'origine : Volk en Staat, 2 mai 1942, p. 3

Légende d'origine : Verordnungsblatt, 7 mars 1942
En octobre 1940, la nomination d'un nouveau directeur de l'Office national du Placement et du Contrôle, le VNV Johannes - Fredericus (Frits) Hendriks (1893-1963), facilite la coopération avec les forces d'occupation. Chef du personnel avant-guerre chez Philips, il est sur la même longueur d’onde que l'occupant et est favorable à un renforcement de l'emprise de l'État sur le marché du travail, à l'instar de ce qui se fait dans l'Allemagne nazie. Il met en œuvre des réformes dans ce sens, aidé en cela par les ordonnances allemandes qui renforcent le contrôle des offices de l'emploi sur les entreprises et facilitent le travail en Allemagne. Le changement de nom du Service national de médiation et de contrôle du travail en Office national du Travail, selon les principes nazis, officiellement en avril 1941 mais appliqué plus tôt par Hendriks, confirme l'évolution vers un Etat plus actif sur le marché du travail, ce qui, soit dit en passant, ne plait pas aux employeurs. Sous la direction d’Hendriks, l'Office national du Travail ne voit aucun inconvénient à participer au recrutement pour l'Allemagne, ce qu’il a d'ailleurs initialement été chargé de faire par Verwilghen.
Ce qui frappe dans la politique de Verwilghen, c'est qu'il proteste souvent ponctuellement et a posteriori contre certaines initiatives de Hendriks, mais qu'il ne parvient pas à obtenir du ministère qu'il contrôle davantage l'Office national du Travail. Sous Hendriks, l'institution adopte une attitude autonome vis-à-vis du ministère du Travail, mais travaille étroitement avec les autorités allemandes (locales). En outre, à partir de septembre 1941, la Militärverwaltung travaille de plus en plus avec des ordonnances, ce qui met hors-jeu le comité des secrétaires généraux. En mars 1942, l'une de ces ordonnances introduit le travail obligatoire en Belgique et dans le nord de la France. Cette mesure est à l’origine de la démission de Verwilghen avec un des principaux arguments avancés que l'Office national du Travail échappe à son contrôle parce que l’ordonnance sur le travail obligatoire en Belgique et dans le nord de la France permet aux forces d'occupation d'utiliser directement les offices du travail pour cette tâche. Au total, cinq autres hauts fonctionnaires succèdent ad interim à Verwilghen. Cette situation n’est pas non plus de nature à rétablir le contrôle du ministère sur l'Office national du Travail. Les tentatives des remplaçants de Verwilghen d'exercer un plus grand contrôle sur cette instance ont en effet été rejetées par l'administration militaire.
Par ailleurs, l'Office national du travail met déjà énergiquement en œuvre la politique de l'emploi de l'occupant, comme en témoigne l'application de l'ordonnance du 30 avril 1942 obligeant les employeurs à remettre les listes des membres de leur personnel. Les offices locaux de l'emploi sont de plus en plus aux mains de VNV et de Rexistes, ce qui renforce la coopération avec les forces d'occupation. Après l'introduction du travail obligatoire en Allemagne en octobre 1942, un conflit s'engage entre le comité des secrétaires généraux et l'administration militaire allemande. L'enjeu est d'éviter que l'administration militaire n'implique directement les fonctionnaires du travail dans la mise en œuvre du travail obligatoire en Allemagne. Le recrutement doit se faire via les Werbestellen. Hendriks a contourné cette interdiction et les offices du travail ont indirectement coopéré à la mise en œuvre du travail obligatoire en Allemagne, par exemple en n'aidant plus à trouver un autre emploi en Belgique ceux qui entrent en ligne de compte pour le recrutement sur base annuelle. L'Office national du Travail devient un instrument aux mains de la politique allemande du travail, non seulement parce que Hendriks est prêt à souscrire aux vues nationales-socialistes en matière d’emploi, mais aussi parce que le ministère du Travail en a perdu le contrôle. Ni Verwilghen ni ses successeurs n'ont été en mesure de le rétablir. La politique en matière d’emploi est un domaine où l’occupant intervient directement, par le biais d’ordonnances et où il peut en outre compter sur le soutien de Hendriks.
Fixation des salaires sur une base autoritaire
Dans le domaine de la concertation sociale, on assiste à un phénomène similaire de déstructuration du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale. La concertation sociale au sein des commissions paritaires, telle qu'elle existe à la veille de la Seconde Guerre mondiale, est supprimée sur ordre de l'occupant. Cette concertation démocratique et organisée, basée sur des organisations représentatives des employeurs et des employés, n'est pas conforme aux conceptions nationales-socialistes. Elle est en outre devenue dysfonctionnelle dans une certaine mesure, car l'occupant a décrété un gel des salaires et des prix et la réglementation en la matière a été transférée à une nouvelle institution publique, le Commissariat aux prix et aux salaires. Cette nouvelle institution, créée en août 1940, est dirigée par Paul Beeckman (1900-1978), membre du VNV. Formellement, le commissariat est subordonné au ministère du Travail (et de l'industrie minière, qui relevait du ministère des Affaires économiques), mais il en a repris une compétence importante, à savoir l'encadrement institutionnel de la fixation des salaires.
Avec la création des comités d'experts sociaux en 1941, la formation des salaires repose sur de nouvelles bases. Ils remplacent les commissions paritaires, mais il y a d'importantes différences. Les comités fonctionnent selon le principe du chef. La fixation des salaires est confiée à un responsable général en matière de travail, Leo Wouters (1902-1987), membre du VNV. C'est lui qui décide du niveau des salaires. Les comités d'experts sociaux ne sont que des organes consultatifs, contrairement aux commissions paritaires où les représentants des syndicats et des employeurs négocient des conventions collectives sur les salaires minimums. Les experts sociaux - le terme le dit déjà - ne sont pas mandataires d'une organisation comme les représentants des commissions paritaires, mais de simples experts en matière de salaires. Cela dit, ils seront également désignés par des organisations de travailleurs et d'employeurs. Pour les travailleurs, il s'agit de l'Union des Travailleurs manuels et intellectuels (UTMI), pour les employeurs des fédérations sectorielles du Comité central industriel (CCI), l'organisation patronale centrale. Le CCI se montre réticent à jouer un rôle dans les comités d'experts sociaux. Les employeurs préfèrent ne pas être associés à l’impopulaire syndicat collaborationniste peu représentatif, surtout dans les secteurs où les syndicats d'avant-guerre ont pris leurs distances avec l’UTMI. De plus, dans les grandes entreprises, le vide laissé par la disparition des structures de concertation et des syndicats d'avant-guerre a été comblé par des alternatives telles que les conseils d'usine, qui peuvent être mieux contrôlés par les employeurs que les commissions paritaires. Le CCI ne veut pas renoncer à cet avantage stratégique en adhérant à un nouveau système de concertation ; l'organisation préfère laisser plusieurs options ouvertes. Comme les Allemands exercent une forte pression et que le CCI craint qu'une opposition soutenue ne conduise à la dissolution des fédérations patronales privées, il finit par céder. Les fédérations présentent des candidats. Toutefois, il ne s'agit pas, comme pour les commissions paritaires, de personnalités centrales des fédérations, mais plutôt de personnalités de deuxième ou troisième plan, précisément pour donner le signal que l'on préfère ne pas se compromettre avec les nouveaux comités d'experts sociaux. Ceux-ci n'ont pas eu beaucoup d'impact. Ils sont souvent ignorés : lorsqu'un employeur souhaite une dérogation au gel des salaires, il négocie directement avec Wouters. Le comité de la construction métallique élabore un système de classification des emplois, qui élimine la conflictualité des relations industrielles et permet d'augmenter les salaires de certaines catégories de travailleurs malgré le gel des salaires.

Légende d'origine : Volk en Staat, 24 août 1940, p. 5
L'échec de la réforme de l'assurance maladie
Les assurances sociales se sont développées dans l'entre-deux-guerres, mais seules les pensions et les allocations familiales sont obligatoires. L'assurance maladie se fait sur base volontaire, par le biais d'une mutualité pilarisée ou d'une mutualité patronale. Les Allemands veulent rendre l'assurance sociale obligatoire avec un système de cotisations centralisées, afin d'aligner à terme les coûts salariaux belges et allemands. Les mutualités existantes devraient être remplacées par une mutualité unique officielle. Tous ces changements devraient être mis en œuvre pour le 1er mars 1941. Le service d'études du ministère de l’Emploi est chargé d'étudier et de concrétiser les propositions, mais il n'est pas parvenu à des résultats en mars 1941. Toute la question de la réforme de l'assurance sociale est mise de côté. La raison en est l'opposition des mutualités catholiques, qui craignent de perdre leur raison d'être en cas d'introduction d'une mutualité officielle unique. Les mutualités socialistes, et en particulier leur dirigeant Arthur Jauniaux, sont d'abord favorables à une mutualité unique. Les mutualités catholiques trouvent des interlocuteurs au sein du ministère auprès de hauts fonctionnaires catholiques tels que Robert Houben (1905-1992), le futur président du PSC-CVP, qui, en 1940, occupe le poste de directeur du département des études juridiques du ministère. C’est aussi un proche collaborateur de Verwilghen. En outre, le changement de priorités des forces d'occupation a également joué un rôle. En 1942, le travail obligatoire en Allemagne retient toute l’attention. En ce qui concerne l'assurance maladie proprement dite, il faut encore tenir compte de la situation spécifique du côté socialiste. Les mutualités y sont souvent directement liées aux syndicats. L'objectif est de fusionner ces syndicats au sein de l’UTMI mais celle-ci suscite de plus en plus d'opposition, y compris de la part des structures syndicales d'avant-guerre. Les dirigeants syndicaux hostiles à l’UTMI ont parfois trouvé refuge au sein des mutualités et peuvent ainsi tenter de contrecarrer l'UTMI. L’occupant a également vu dans ce lien entre syndicats et mutualités une occasion d'essayer d'accroître la popularité de l'UTMI en utilisant les mutualités comme canal de recrutement pour l'UTMI. Les mutualités socialistes se sont vu attribuer un Verwalter précisément pour neutraliser l'opposition à l'UTMI et pour utiliser les mutualités afin de développer l'UTMI. Pour l'occupant, ce dernier point est plus important que l'assurance maladie obligatoire. D'ailleurs, l'intervention allemande s'est faite directement, sans l'entremise du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale.
Un système d’assurance maladie généralisé et obligatoire n'a donc pas vu le jour pendant l'occupation. Il est certes entré en vigueur pour les personnes travaillant dans un service allemand, pour une entreprise privée travaillant pour l'armée allemande et celles qui sont actives dans des formations (para)militaires ou qui travaillent en Allemagne. Les personnes entrant dans l'une de ces catégories doivent s'affilier à la Krankenkasse allemande (la caisse d'assurance maladie officielle), qui fonctionne également en Belgique. La famille est également couverte. Au total, environ 100 000 personnes sont assurées en 1943. L'employeur et l'employé payent une cotisation obligatoire pour cette assurance maladie, qui est versée par l'employeur, en même temps que l'impôt sur les salaires, à une Caisse centrale nouvellement créée et chargée de la distribution des cotisations sociales et fiscales. Cette caisse est gérée par le ministère des Finances et le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale.
Préparer l'après-guerre
Les groupes d'étude préparant l'après-guerre se sont également penchés sur la réforme de l'assurance sociale. Les fonctionnaires (déchus) du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale y ont joué un rôle important. Léon Bisqueret, Robert Houben et Maurice Delhuvenne sont membres de la commission de législation sociale du Centre Belge d'Etude et de Documentation/Belgisch Centrum voor Studie en Documentatie, qui travaillait sous la direction d’Alexandre Delmer, secrétaire général déchu des Travaux Publics. La commission composée de représentants d'une partie du patronat, d'une partie des syndicats d'avant-guerre, des mutualités et des fonctionnaires a joué un rôle encore plus important pour l’élaboration de la sécurité sociale dans l'après-guerre. C’est elle qui a préparé le Pacte social. Au sein de cette commission, Henri Fuss (1882-1964) a joué un rôle clé. Commissaire royal à la réforme de l'assurance-chômage dans les années 1930, il devient en 1938 directeur général de la Direction du travail, puis des mutualités au ministère du Travail et de la Prévoyance sociale. Il est suspendu par les forces d'occupation en raison de son profil socialiste. Après la libération, il reprend ses fonctions de secrétaire général par intérim et participe directement à la rédaction de l’arrêté-loi du 28 décembre 1944 relatif à la sécurité sociale obligatoire des travailleurs, qui reprend directement le modèle du Pacte social.
Si l'on examine le rôle du ministère du Travail pendant l'occupation, deux choses ressortent. Premièrement, la politique sociale est devenue de plus en plus fragmentée, car de nouvelles institutions publiques ont été créées pour certains sphères de compétences, souvent dotées d'un personnel d’Ordre nouveau et jouissant de la confiance de l'occupant. C'est le cas de la réglementation des prix et des salaires et de la politique de l’emploi. « Le Commissariat général à la Reconstruction se trouvait également en partie dans le domaine de politique du ministère, mais ici, il y avait une direction partagée avec le ministère du Travail et de la Prévoyance sociale.. Deuxièmement, on constate que, bien que l’occupant souhaite que sa politique soit mise en œuvre par les secrétaires généraux, dans les domaines politiques importants de la compétence du ministère du Travail et de la Prévoyance sociale, il est souvent intervenu directement sans se soucier du ministère. Ces deux facteurs combinés - la création de nouvelles institutions et l'intervention directe - ont entraîné une perte de pouvoir et d'influence du ministère. Les changements fréquents à sa tête y ont également contribué.

Collection : Archives CCI 1394
Légende d'origine : Projet d'accord de solidarité sociale, 20 avril 1944

Légende d'origine : Henri Fuss, s.d.
Bibliographie
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www.odis.be